La mise en scène

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L'écriture de Pinter est foncièrement théâtrale. C'est un acteur qui écrit pour des acteurs sur une scène devant un public. La participation du public est implicite dans son écriture. Il ne nous dit pas tout. À nous d'interpréter ce que nous voyons et entendons. Il nous amuse, il nous intéresse, il joue avec nous et il nous invite à écouter ce qui n'est pas dit. Pinter est économe, il ne gaspille pas ses effets. Il est conscient de l'impact de chaque mot, chaque phrase, chaque silence. Rien n'est gratuit, tout est signifiant. Le spectateur est attentif : une partie de son plaisir provient de sa propre perspicacité.


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À première vue, par rapport à leurs prédécesseurs et à leurs successeurs, les personnages de Trahisons semblent bien partager un terrain commun, où tout est sûr. Un certain nombre de faits ne sont jamais mis en doute. Robert est éditeur, Jerry agent littéraire, Emma dirige une galerie. Elle est l'épouse de Robert et la maîtresse de Jerry, qui est aussi un vieil ami de Robert. La situation paraît plutôt banale et malgré les changements de lieu, on sait tout de suite où l'on se trouve, il n'y a pas de mystère. En fait le monde extérieur, apparent, de Trahisons est un monde de certitudes. Mais là n'est pas le sujet. Ce qui nous concerne vraiment ce sont les rapports entre les trois personnages, la vraie nature de leurs sentiments. Là aussi d'abord tout paraît clair et même plutôt banal. Mais au fur et à mesure que l'on remonte dans ce passé commun nous sommes amenés à constater qu'il s'agit bel et bien de sables mouvants.           Qui trahit qui ? La question se pose sans cesse, et la réponse n'est jamais définitive.


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Le texte d'une pièce de Pinter est la partie visible de l'iceberg. Les acteurs doivent apporter la partie invisible — c'est-à-dire la matière humaine qui constitue la vie intérieure des personnages. J'ai choisi trois acteurs qui pourront je crois nous emmener très loin, au cœur de cette pièce qui, superficiellement, paraît dure, froide et sans mystère, mais qui en dessous de cette carapace contient toute une masse de chair, chaude, vibrante, faible et contradictoire — c’est-à-dire humaine.